En Afrique Noire, l’Art pour l’Art n’existe pas en tant que tel. D’ailleurs, dans la plupart des sociétés traditionnelles, l’Art revêt avant tout une fonction essentiellement utilitaire, unificatrice, thérapeutique, rituelle et métaphysique : c’est ainsi que les créations plastiques ainsi que les manifestations « culturelles » issues du cadre traditionnel (notamment la danse, la musique ainsi que la fabrication de reliques), concourent de façon évidente et consciente au maintient d’un certain équilibre individuel et social. L’Art pour lui-même est en fait un concept récent en Occident, où l’Art religieux et utilitaire a été longtemps prédominant.
La dimension « carriériste » qui caractérise une part importante de l’industrie culturelle moderne, tend à isoler « l’artiste » dans une sphère purement « marchande » et compétitrice qui l’éloigne de sa responsabilité sociale, donc de l’essence même de sa vocation. Cette dimension marchande de l’Art situe de plus en plus la culture moderne comme un luxe émanant d’une démarche individualiste, celle de l’artiste souhaitant à tout prix « s ‘exprimer » et « vivre de son art ». Là où l’homme et la femme de culture étaient autrefois résolument tournés vers la communauté et le maintient de son équilibre, il semblerait que les artistes aient aujourd’hui tourné leur attention sur la contemplation de leur propre individualité : cette contemplation est en même temps le moyen et la finalité de cet « art moderne », qui se destine finalement non pas à la communauté en tant que tel, mais à un public de « fans » qui n’est utile à l’artiste qu’en tant qu’adorateur de son narcissisme : c’est ainsi que l’artiste devient un véritable miroir du narcissisme généralisé.
© 2017, David Mboussou. Tous droits réservés. Publié sur : www.davidmboussou.com
Dessin © Corail King, direction artistique Dvid Mboussou (masque Ngil revisité, thème Nature / Culture)